Chaque semaine, vous trouverez ici une fanfiction qui vous permettra d'en apprendre plus sur les aventures des champions de la League of legends. Cette semaine, place au cinquième chapitre de la saga Freljord.
Il y a cet instant où tout est encore possible. Il n'avait besoin que de quelques mots pour créer la discorde. Mais en attendant, tout restait encore inchangé, et si Revan ne faisait rien, Ashe resterait face à lui, confiante et sereine. Il n'y avait que ce goût amer qui irritait sa gorge et la peur qui venait nouer le creux de son ventre, et lorsque Revan entrouvrait la bouche, c'était bel et bien la honte qui étouffait chacune de ses tentatives d'aveu.
C'était donc cet instant précis, figé dans un climat d'irréel et de doute, juste avant de confesser l'inavouable, juste avant que tout ne change.
Ashe observait Revan silencieusement, le détaillant des yeux, et se laissant peu à peu envahir par un profond malaise. La tension qui régnait dans l'esprit de son compagnon se propageait insidieusement dans l'air glacial, au sommet de cette colline, à quelques pas du temple des Gardiens du givre. Cherchant un regard qui ne cessait de la fuir encore et encore, elle comprit. Elle pouvait sentir cet aveu pendre aux lèvres de Revan sans qu'il ne puisse encore le prononcer. Elle voyait la honte confondre son visage et lorsqu'elle lui demanda avec une infinie douceur de se livrer à elle, Revan tomba à genoux en agrippant les mains de la jeune femme. Lorsque la première phrase s'échappa de la bouche Revan, il ne parvint pas à contenir les autres et il avoua tout, tandis que les mots coulaient, à l'image d'un flot salvateur, impétueux et sauvage qui avait été contraint trop longtemps. Plus la vérité s'érigeait en maîtresse et plus Revan serrait les mains de la reine dans les siennes, scellées par ses larmes rédemptrices.
Ashe restait figée devant lui, les yeux perdus dans le vide et la bouche frémissante. Elle se sentait si vulnérable à ce moment précis, et pendant que les lamentations de Revan résonnaient vaguement à ses oreilles, elle sentit une colère sourde et brûlante prendre place en son sein et chasser petit à petit sa gentillesse et sa compassion. Elle ne pouvait plus se permettre la même douceur, car elle avait un royaume à gouverner, et maintenant, une vie plus chère que toutes les autres à ses yeux.
En pensant à son enfant à naître, Ashe pencha les yeux vers Revan et ne vit en lui que faiblesse et lâcheté. Alors qu'elle s'apprêtait à lui parler, la jeune femme fut surprise d'entendre Revan devancer ses pensées et implorer qu'on l'exécute comme le traître qu'il était, au lieu de pleurer sa clémence. Ashe rejeta alors les mains du jeune homme avec violence. Elle lui ordonna de passer devant elle afin de rejoindre le reste de la troupe.
Les jours qui suivirent l'aveu de Revan furent insupportables pour les deux protagonistes. Le jeune homme ne parvenait pas à détacher ses yeux de la reine. Ashe, quant à elle, s'était enfermée dans un mutisme déroutant et, alors qu'ils regagnaient leurs terres, Revan ne savait plus si c'était la peur ou l'impatience qui rythmaient l'idée de sa mort prochaine.
Une fois arrivés à destination, Ashe empoigna Revan avec force, tout en pointant du doigt les habitants du village :
« Demain, tu leur diras tout, et une fois que cela sera fait, je te conduirai moi-même sur les lieux de ton supplice. »
La nuit passa alors bien vite et, rapidement, le soleil hivernal de Freljord se leva sur le visage meurtri et coupable de Revan.
C'est dans un silence terrifiant que le jeune homme fut emmené au petit matin, aux alentours du village avarosan. Un mur de glace se dressait sur plusieurs mètres de hauteur et tandis que Revan progressait, poussé par ses gardiens, et relevé sans ménagement lorsqu'il trébuchait, il percevait au travers des épaisses couches de glace, les silhouettes crucifiées des précédents suppliciés. C'était le calvaire réservé aux traîtres et aux enfants oubliés d'Avarosa, et lorsque Revan prit la parole pour confesser les trahisons dont il avait été coupable, le silence environnant se fit plus lourd encore. Il n'y avait que le vent qui hurlait sur le versant des montagnes, et les regards froids et implacables des Avarosans sur lui. Revan savait qu'il méritait cette haine, mais au fond de lui, il fut blessé de ce qu'avaient pu lui apporter ces quelques instants d'honnêteté, car finalement, Ashe était toujours là, et c'est elle aujourd'hui qui le condamnait à mort. Il ne subsistait plus que l'attente, la ferveur, et la fureur, toutes trois dirigées vers le supplicié.
Ashe attendait au pied du mur alors que des mains hissaient le corps de Revan le long de la paroi de givre. Elle ne détourna pas les yeux quand les bourreaux brandirent leurs masses pour enfoncer, glace contre chair, des pieux gelés, façonnés pour l'exécution, et ne les détourna pas non plus quand elle vit le sang de Revan se cristalliser au fur et à mesure qu'on lui perforait les poignets puis les pieds.
Lorsque le jeune homme fut ainsi érigé en martyr, Ashe s'approcha de lui doucement, un calice de métal entre les mains, rappelant à Revan ce qu'il savait déjà :
« Nous continuerons cela des jours durant, et chaque fois, je viendrai ajouter un peu plus à la glace qui fera ta mort. »
Sur ces mots, la jeune reine versa progressivement le contenu de la coupe sur le torse nu de Revan, et elle observa cette eau se métamorphoser en une fine paroi de glace, pure et translucide. Le martyr deviendrait peu à peu cette statue de givre, et alors qu'ils s'éloignaient tous du supplicié, Ashe le regarda quelques minutes, pendant lesquelles Revan soutint son regard, alors qu'une lente agonie creusait et gelait sa chair.
Un jour et une nuit s'étaient écoulés depuis le début du supplice et, très régulièrement, le jeune homme recevait la visite des habitants du village. Chacun d'eux venait verser sur son corps meurtri une coupe d'eau supplémentaire, et chaque fois, la douleur se réveillait, arrachant à Revan des gémissements et des râles en tout genre. Certains le méprisaient, tandis que d'autres ne parvenaient pas à soutenir la vue de ce corps laissé à l'agonie. Revan les regardait tous, inlassablement, et il se rappelait alors des contes d'Avarosa et des cantiques à la louange de Freljord. Il laissait alors son esprit lâcher prise, jusqu'à sentir les foudres lentes du sommeil et de la douleur l'emporter vers un coma glacé. Il laissait ses pensées vagabonder quelques instants, priant pour sombrer une fois pour toutes, pour ne plus jamais se réveiller.
Une nuit, alors qu'il recouvrait ses esprits, Revan distingua peu à peu la fine silhouette de la reine se diriger vers lui. Elle avançait d'un pas confiant, et portait une torche enflammée dont l'éclat flamboyant aveugla le jeune homme, qui n'avait connu que les ténèbres dernièrement. Elle vint à lui, sans mot dire, et elle approcha le flambeau de la peau du jeune homme. La paroi de givre qui s'était sculptée sur le corps de Revan se mit à fondre doucement, dessinant cent sillons acides sur la peau rongée et ensanglantée du jeune homme. Elle l'entendit gémir lorsque les pieux de givre fondirent aussi et alors qu'elle promenait la flamme le long du corps de Revan pour le libérer de l'emprise de la glace, il tomba lourdement au sol, tant il était épuisé et affaibli. Ashe le releva alors et le drapa d'un large manteau de fourrure, avant de lui donner à boire. Elle lui parla doucement :
« Je n'ai jamais voulu ta mort, pas plus que tu ne souhaitais la mienne. Mais je voulais disposer de ta vie, l'avoir entre mes mains, comme tu as pu le faire avec moi. Nous voilà maintenant, vivants, et nous sommes quittes. Tu seras toujours ici chez toi, et si tu crois encore en moi en tant que reine, alors je me montrerai à la hauteur de tes espérances. Nous marcherons ensemble vers le camp de Sejuani et nous ne craindrons rien, car même elle n'aura pas réussi à nous dresser l'un contre l'autre. »