Les jeux vidéo ont longtemps souffert d'une image négative véhiculée par les médias. On nous a sans cesse répété que jouer pourrait provoquer l'isolement du joueur, voire même le rendre violent (et ce n'est toujours pas terminé). Bref, le jeu vidéo a souvent bon dos pour justifier certains maux de notre société.
Cependant, une étude publiée sur le site internet de la revue scientifique américaine Plos One affirme que la pratique du jeu vidéo peut aussi être bénéfique pour le cerveau.
Cette revue éditée quotidiennement par la Public Library of Science (sorte de bibliothèque scientifique publique) expose les travaux menés par des chercheurs britanniques de la Queen Mary University of London en collaboration avec l'University of Texas au sujet de l'influence des jeux de stratégie en temps réel (STR) sur la flexibilité cognitive.
La flexibilité cognitive
La flexibilité cognitive peut être définie comme étant « une fonction mentale permettant de changer de stratégie ou de passer d'une disposition mentale à une autre, particulièrement dans le cadre de la résolution de problèmes ».
C'est pourquoi, dans l'objectif de commencer leur étude, les chercheurs ont pris comme base théorique que les réseaux cérébraux en rapport avec la flexibilité cognitive peuvent subir l'influence d'une expérience telle que jouer à un jeu vidéo. En pratique, cela mettrait ainsi l'accent sur l'entretien et la manipulation rapide des différentes sources d'informations conduisant à l'amélioration de la fonction cognitive. C'est donc sur ces bases que les chercheurs ont décidé de mener à bien leurs expériences tout en considérant que les jeux vidéo prenaient une part prépondérante dans notre style de vie moderne.
StarCraft produit une masse d'informations que le cerveau doit analyser
Une étude qui se veut innovante
Ce n'est pas la première étude qui fait le lien entre les jeux vidéo et les facultés cognitives puisqu'il est déjà admis que les joueurs de "jeux d'actions" et plus particulièrement de FPS (First Person Shooter) tels que Counter Strike ou encore Call of Duty ont développé leurs facultés de perceptions. Parmi ces facultés, il y a tout ce qui est du domaine de la compréhension rapide et logique des situations visuelles et contextuelles. Selon ses initiateurs, cette étude se veut nouvelle puisqu'elle se concentre sur des changements importants de la « pensée rapide » alors que les anciennes études visaient essentiellement la « perception rapide ».
StarCraft I face aux Sims 2
En ce qui concerne le choix du jeu de stratégie en temps réel, les chercheurs ont choisi StarCraft premier du nom. En effet, le titre de Blizzard était un très bon candidat pour cette étude puisqu'il a permis aux chercheurs d'étudier la « pensée rapide » tout en n'altérant pas « perception rapide » permettant ainsi de déterminer l'influence du jeu sur la flexibilité cognitive.
Afin d'optimiser l'étude, le jeu a été configuré de manière à ce que les alertes de la mini carte soient supprimées ce qui aura pour conséquence de forcer le joueur à stimuler sa mémoire lorsqu'il devra gérer des évènements se déroulant en dehors de son écran de jeu. StarCraft sera ainsi comparé aux Sims 2 qui est un jeu de simulation/gestion de vie.
Pour mener à bien cette expérience, 72 étudiantes de l'University of Texas à Austin ont été recrutées et non pas des étudiants parce que « l'étude a été incapable de recruter un nombre suffisant de volontaires de sexe masculin qui ont joué à des jeux vidéo pendant moins de deux heures par semaine ». En effet, les volontaires choisies aléatoirement devaient avoir comme critère principal d'être des joueurs occasionnels ayant déclaré moins de deux heures de jeu par semaine. À noter que la moyenne d'âge des volontaires est d'environ vingt ans.
Voici comment les chercheurs ont procédé pour observer les évolutions de la flexibilité cognitive :
1) Mise en place d'une batterie de tests psychologiques et cognitifs sur les joueuses novices.
2) Répartition des volontaires en 3 groupes de jeux différents.
| Groupes | Groupe B1 | Groupe B2 | Groupe S2 |
| Jeux | StarCraft | StarCraft | Les Sims 2 |
| Objectifs | Les joueuses devaient gérer une seule base (alliée comme ennemie) | Les joueuses devaient gérer deux bases (alliée comme ennemie) | Les joueuses devaient gérer une famille au sein d'une maison |
3) Les bénévoles ont eu 49 jours (soit 7 semaines) pour effectuer les 40 heures de jeu requises.
4) Mise en place d'une seconde partie de tests psychologiques et cognitifs après les 40 heures de jeu.
5) Comparaison entre les résultats initiaux et finaux.
Des résultats concluants pour StarCraft
Après avoir étudié les résultats des différents tests, il en résulte que les joueuses de StarCraft ont obtenu de meilleurs résultats cognitifs que les celles ayant jouées aux Sims 2 (qui n'obtiennent pas de résultats). De plus, il est possible de distinguer que le groupe de « volontaires qui a joué à la version la plus complexe du jeu [NLDR : avec deux bases à gérer] a réalisé de meilleurs résultats dans les tests psychologiques finaux ». Des résultats allant donc au-delà des espérances. Les scientifiques expliquent que ce groupe a bénéficié « d'une plus grande souplesse cognitive » puisque les joueuses ont eu à traiter plus d'informations au sein du jeu.
Il en résulte donc que StarCraft (et a fortiori les jeux de stratégie en temps réel comme peut l'être Age of Empire par exemple) favorisent le développement de la flexibilité cognitive mise en évidence par l'amélioration significative des résultats entre les tests de début et de fin d'étude contrairement aux Sims. Un entraînement d'une quarantaine d'heures a alors suffit à améliorer de manière non négligeable la flexibilité cognitive des joueuses de StarCraft. L'équipe de recherche en conclue que la flexibilité cognitive n'est pas statique et qu'une amélioration de celle-ci est possible si entraînement il y a.
L'étude s'achève donc sur une note optimiste puisqu'il est avancé que de telles découvertes pourraient permettre d'envisager la mise en place d'un traitement de l'attention chez les personnes souffrant d'hyperactivité, de complications dûes à la vieillesse ou à des lésions cérébrales traumatiques.
Cependant, comme pour toute étude scientifique, ces résultats sont à prendre avec un certain recul tant qu'ils ne sont pas confirmés par de nouveaux travaux. Cela ne vous empêche pas de continuer à multiplier les parties de StarCraft dans l'espérance d'améliorer votre flexibilité cognitive !
