Tout à l’heure, j’arrivais à la conclusion que les projets tels qu’ils sont menés actuellement dans l’eSport s’apparentent de fait à la création d’entreprise. La question devient de savoir si ce modèle, le Crowdfunding, est adapté au financement d’entreprise et de leurs projets. Je vais faire un distinguo qui me semble important. Il y a des projets et des gens qui ne pouvaient pas rassembler les fonds nécessaires pour leurs projets.
Deux projets me viennent en tête, Stephane Bittoun en parlait : Tales of the Lane et le Barcraft Game Over à Nantes. Les sommes dont on parle sont colossales : TotL c’est plus de 100 000 euros et le Barcraft demande 10 000 euros pour un projet dans lequel les porteurs du projet ont investi près de 180 000 euros sur leurs fonds personnels et des prêts. Dans ces deux cas-là, les gestionnaires du projet font face à des postes de dépenses importants qu’ils ne peuvent pas vraiment réduire, ou séparer en petites partie. De plus on peut supposer assez facilement que les gens qui vont lancer le Barcraft mettent tout ce qu’ils ont bout à bout pour monter ce projet et que cela ne suffit pas et dans ce cas-là, le crowdfunding se justifie. Dans le cas de TotL le projet ne peut être viable que si la communauté se mobilise : on ne loue pas le casino de paris si l’on n’est pas sûr que les gens vont suivre le projet !
Il y a ensuite les projets d’Anoss et Mak0z qui font financer le développement de leurs « entreprises » par la communauté en échange de contribution symbolique. En somme ils font la même chose que les exemples que j’ai cité au-dessus. Mais pourquoi est-ce différent dans ce cas ? Très bonne question. Ce qui me gêne, ce sont les sommes dont on parle. Là, on est très loin des 10 000 euros manquants pour Game Over, des 80 000 de TotL… Qu’est-ce que ça change me demanderont certains ? Ça change que je trouve que ca donne l'impression de projets dont les fondateurs n’ont ni la patience, ni la compétence pour trouver 3 000 euros. Admettons que le montant qu’ils aient demandé soit bien en dessous de ce qu’ils ont demandé. Parlons même de 10 000 euros ? En permanence des entrepreneurs, prennent des risques et se lancent dans des projets pas forcément viables. Là on parle de sommes que des étudiants peuvent emprunter. C’est-à-dire des gens qui n’ont aucun statut social, aucune assurance de pouvoir rembourser. Donc des gens qui ont un travail et un revenu, même instable peuvent emprunter ces sommes. Il est vrai que c’est prendre des risques, mais j’ai envie de vous dire que c’est l’essence même de entrepreneuriat. En soit je n’ai rien contre Mak0z et Anoss, ni contre leurs projets. Mais je trouve dommage de faire appel comme ça à la communauté alors qu’ils auraient pu financer cela autrement. Parce que l’argent et la patience de la communauté, ça s’érode. Et viendra des projets de grande ampleur qui ne pourront pas compter sur la communauté pour se monter, parce que cette patience et cet argent seront partis dans des projets qui auraient pu se financer autrement. Je serais un peu moins sévère avec Zerator, au vu des risques qu’il a pris en quittant son poste chez [M] pour se lancer en freelance.
Si je devais conclure, je dirais que le Crowdfunding est adapté à l’eSport qui repose sur sa communauté pour se développer, mais qu’il ne faut pas que cela devienne une solution de facilité qui mette de côté les méthodes « classiques » entrepreneuriat qui sont indispensables également à la constitution d’une image sérieuse de l’eSport. L’eSport et le Crodwfunding ont de beaux jours devant eux, mains dans la main et j’ai hâte de voir quels sont les prochains projets à venir. Je vous laisse avec la vision des choses de Stephane Bittoun, directeur général de My Major Company, qui a un avis très tranché sur la question. Quant à moi je vous retrouve bientôt pour un nouveau dossier business !
Stephane Bittoun, directeur général My Major Company à propos de l’avenir de l’eSport et du Crowdfunding
Le rapprochement entre l’eSport et le crowdfunding est naturel. L’eSport est aujourd’hui une contreculture qui se développe, se professionnalise et progresse. Le financement participatif est une méthode alternative de financement. Les deux se passant quasiment exclusivement sur internet, la rencontre est inévitable. My Major Company est très vigilante pour faire en sorte que les projets soient vrais, fiables. Des accidents de parcours comme eSport pour Tous arrivent mais restent exceptionnels.
Nous sommes à l’écoute de la communauté et nous protégerons les donateurs et les internautes des projets bancals. Si des polémiques arrivent, nous nous rangerons du côté des internautes. Mais j’insiste sur le fait que c’est entre eux et le porteur du projet que le lien essentiel doit exister, nous ne sommes qu’un intermédiaire et on ne peut exiger de nous plus que d’autres acteurs de l’économie. Quand ils montent des projets, les porteurs de projet engagent seuls toute la responsabilité juridique et morale de l’utilisation des fonds. MMC n’exerce pas de contrôle après avoir reversé les fonds sur leur utilisation, c’est à la communauté de le faire.
Je suis très optimiste sur l’avenir des projets eSport et du financement participatif, la communauté est réactive et perspicace et sait très bien distinguer le bon grain de l’ivraie. Beaucoup de belles choses ont été faites, et beaucoup restent à faire. Nous accompagnerons les gens sérieux dans la réalisation de leurs projets, de la présentation, au vidéo jusqu’aux contreparties. MMC est une plate-forme ouverte, alors n’hésitez pas !