Face à l’investissement majeur de Riot Games dans le monde de l’eSport à travers League of Legends, Blizzard, vieux briscard de l’eSport, a réagi en remettant sur pied ses WCS mais en en faisant une compétition régulière. Pour cette année, les saisons sont au nombre de trois, offrant à chaque participant des points pour se qualifier à la finale mondiale à la fin de l’année lors de la BlizzCon. Il faut noter que les MLG, IEM, DreamHack et HomeStory Cup offrent des points WCS.
À chaque saison, un cashprize est mis en jeu pour intéresser les joueurs. À la différence du format LCS, il existe une "deuxième division" qui offre elle aussi un cashprize et des slots pour la première division. Étant donné que le format est en phase de poules avec un arbre ensuite, les joueurs n’ont pas l’assurance de participer jusqu’au bout de la compétition. Ici pas d’exclusivité, très peu d’exigences en terme d’image contrairement aux LCS.
Sous ce format qui apparaît plus ouvert on voit, dès lors que l’on creuse un peu, que Blizzard prend de fait une situation de monopole sur la scène eSport de StarCraft II. Car même s’il existe d’autres tournois majeurs, le géant d’Anaheim prend un certain contrôle sur ces évènements. En effet, en offrant des points WCS, ces tournois intègrent de fait le circuit WCS en donnant à Blizzard un poids supplémentaire sur eux.
Nazca sur "Les WCS, un monopole caché ?"
Le circuit des WCS est exclusif en ce sens qu’il est continu. Les saisons s’enchaînent avec les finales de saisons et il y a très peu de temps de pause, concrètement, pour organiser de gros tournois internationaux en étant assuré que les têtes d’affiche coréennes pourront être présentes. Les seules rescapées sont les compétitions internationales historiques comme les MLG, DreamHack et IEM. Comparons avec le circuit WCS 2012 qui faisait la part belle aux qualifications nationales puis continentales et enfin à la finale mondiale, permettant à des joueurs "locaux" de briller dans leur pays tout en assurant un niveau Code S à la finale mondiale. Dans le circuit WCS 2013 la dimension nationale a totalement disparu, probablement parce que le retour sur investissement n’était pas suffisant. De plus, la GSL, les MLG (pour la Saison 1 tout du moins), et autres compétitions majeures sont désormais intégrées aux WCS - la DreamHack ou la HomeStory Cup rapportent des points WCS. Elles ont été affiliées au système de points WCS d’une part, mais elles ont aussi perdu en cashprize - et là je parle surtout de la MLG. Les revenus pour les joueurs «moyens» - comprenez de niveau Code A - a donc diminué avec ce système ; ça a même engendré une grosse levée de boucliers après l’annonce de Blizzard sur les nouveaux WCS. Les joueurs sont donc concrètement dans l’impossibilité de se détourner du circuit WCS tout simplement parce qu’il n’existe pas de circuit alternatif. En bref, en créant les WCS 2013, Blizzard s’est assuré du monopole. C’est un choix tout à fait délibéré.
Le paradoxe de ce modèle, c’est que Blizzard avec cette démarche ferme un peu la porte à des circuits alternatifs, mais dans le même temps pousse certains joueurs à se détourner des WCS. En effet, si l’on n’est pas un joueur de tout premier plan, les cashprizes sans être ridicules ne sont pas mirobolants et pour certains, il peut être plus intéressant de se tourner vers d’autres tournois. Ainsi un joueur de milieu de tableau de la Challenger League touchera environ 300 $, soit le cashprize d’une Zotac et d’une Go4SC2.
Nazca sur "Les WCS, un monopole caché ?"
Pour l’instant les choses sont trop récentes pour qu’on ait un réel recul dessus mais il se pourrait que l’on voie fleurir de plus en plus de tournois online permettant justement à certains joueurs de récolter un simili-salaire. Quelques initiatives sont déjà place, par exemple l’ESET a refondé son système et propose désormais des saisons avec un système de points. Même chose pour les IEM qui ont récemment présenté leur saison VIII 2013/2014, qui rapporte des points WCS soit dit en passant. Il n’est donc pas surprenant de retrouver les «petits» joueurs de niveau Code B dans les qualifications de ces événements. San, de l’équipe Azubu, est l’exemple parfait d’un tel joueur qui après avoir été sorti des WCS Corée à la saison 1 a tourné son attention vers les tournois online. En conclusion, je pense qu’il est très difficile à l’heure actuelle pour un joueur de se détourner du circuit WCS, parce qu’il n’existe pas encore de circuit alternatif suffisamment stable pour lui assurer à la fois des revenus réguliers et une visibilité auprès du public.
Cette question de la visibilité devient un argument de poids pour les joueurs tentés de se détourner du circuit de Blizzard. Car au-delà du salaire et des cashprizes, les joueurs vivent beaucoup de leur image, que ce soit auprès des sponsors ou des streams. Mais, et on l’a vu la semaine dernière sur le dossier du sponsoring, les sponsors se tournent vers les tournois et structures majeures en priorité. Un joueur qui fera le choix de s’en détourner, s’il n’a pas une grosse fanbase, court le risque de s’isoler et de perdre en visibilité, en réputation et donc en revenu.