Ton univers impitoyable
ou l’art du recyclage (de bunker)
Geek is, Chris Metzen à la Blizzcon
Il n’est pas besoin que Chris Metzen le répète encore une fois, les petits gars de Blizzard sont des geeks (en tout cas côté créatif), attachés à la fantasy via Warcraft et Diablo, et bien sûr à la science-fiction. Comme pour beaucoup d’univers de jeux vidéos – benjamin dans la famille des oeuvres d’imaginaire – c’est dans la littérature et le cinéma que les influences sont puisées. Starcraft adapte pas mal de concepts standards du genre pour former un tout cohérent. Pour rappel, nous sommes dans un futur où une humanité surpeuplée balance ses ressortissants les plus gênants au petit bonheur la chance dans l’espace via d’énormes vaisseaux-prisons.
Cette joyeuse troupe de taulards finit par débarquer sur différentes planètes du secteur Koprulu, dans lequel ils vont gentiment macro, poser plein de bases et finir par se doter d’une civilisation coupée de la Terre. Cette colonisation de territoires hostiles par des prisonniers encombrants ressemble peu ou prou à celle de l’Australie, sauf qu’au lieu de tomber sur des dingos et des aborigènes, ils tombent sur des Protoss et des Zergs, largement plus OP.
Air Prison vous offre un aller simple pour Koprulu, ses planètes volcaniques,
ses autochtones accueillants et ses plages de creep.
Ce pitch n’a rien de bien original. On a d’un côté la race sage et ancienne qui se la raconte (les Protoss), tout en haute technologie et en mysticisme, légèrement sclérosée et sur le retour. De l’autre, on a l’essaim alien-insectoïde-envahisseur (j’ai nommé les Zergs). Les humains, au milieu de tout ça, sont clairement dépassés (problème d’imbalance ?), mais sont présentés comme une race de survivants débrouillards, sachant dominer leur environnement et s’armer un peu à l’arrache contre plus forts qu’eux : un classique. D’autant que les colons de base, c’est pas des rigolos : des mecs, des vrais, des tatoués, des vrais bonshommes façon western.
On a beaucoup jazzé sur les similitudes déroutantes entre Warhammer 40 K et Starcraft : les gros meuuurines en armures disproportionnées, les Protoss/Eldars ancestraux et les insectes grouillants zergo-tyrannides. Si Warhammer 40K précède bien SC, pas de quoi non plus la ramener, car Games Workshop n’a, comme à son habitude, rien inventé. Les soldats en combi du futur et les mécas n’ont rien d’original. Les peuples mystiques hi-tech divisés en light et dark ne sont qu’une adaptation des Elfes de la mythologie germanique et pullulent dans toute la littérature SF. Quant aux formes de vie parasites primitives, à reines et mentalité d’essaim, on le doit tout d’abord aux insectes eux-mêmes, mais aussi tout simplement aux fameux Aliens ou encore aux Broods de Marvel, apparus 5 ans avant Warhammer 40K. On pourra d’ailleurs retrouver un triptyque très proche avec Aliens vs Predators.
Games Workshop qui accuse de plagiat, c’est un peu l’hôpital qui se fout du médivac.
On retrouve également le bon vieux cliché de la race antédiluvienne quasi-divine aujourd’hui prétendument disparue qui nous a laissé des petits cadeaux. Ici, ce sont les Xel’Naga, créateurs des Zergs et des Protoss. On nous fait le même coup dans Stargate ou dans Mass Effect, sauf qu’au lieu de nous laisser des portes de transfert, ils ont juste mis des tours bien pratiques pour voir venir les pushs, ainsi que quelques artefacts. Ce bon vieux mécanisme usé n’est rien d’autre que la version SF des atlantes/hyperboréens/aliens-mayas/grands anciens aux noms imprononçables avec des apostrophes et des « h » partout.
Bon, c’est bien beau le recyclage et ça peut donner des univers passionnants, mais encore faut-il s’en servir pour raconter quelque chose.